Le confinement doit, malgré tout, avoir du bon : il remet en cause pas mal de monde et pas mal de préjugés…souvenez-vous en mars 2020 : le grand silence, le chant des oiseaux, la pollution en régression…
Pour nous, association citoyenne, dont une des missions statutaires est :
« De former et informer par tous moyens légaux les citoyens sans distinction sur l'exercice de leurs droits et de leurs devoirs sur tout ce qui a trait à la vie citoyenne »,
c’est donc aussi, pour ce temps de confinement celui de la réflexion, de l’écriture…sur la citoyenneté, le civisme, la constitution, la transparence dans la vie publique, la défense des libertés…
Au moment où la lutte contre COVID-19 a contraint le Président de la République et le Gouvernement à prendre des mesures "d'état d'urgence", donc de suspendre des libertés, connaître un peu mieux le Conseil d'État nous apparait nécessaire. En effet, nous citoyens devons savoir quelles protections avons-nous contre les abus que peut faire l'appareil étatique quand il bénéficie de pouvoirs exceptionnels ? Sur quelle protections le citoyen peut compter contre les abus de pouvoirs dans ces circonstances particulières ?
Ce jour, nous vous proposons donc de découvrir ou redécouvrir cette juridiction « suprême » qu’est le CONSEIL D’ÉTAT.
MIEUX CONNAITRE LE CONSEIL D’ÉTAT
Le Conseil d'État se définit ainsi (sur son site) :
« Le Conseil d'État comprend 231 membres en activité et 408 agents. Deux tiers des membres sont présents au Palais-Royal pour remplir trois missions :
- conseiller le gouvernement et le parlement,
- juger les actes des administrations,
- gérer la juridiction administrative. »
Un tiers de ses membres vaque à d’autres missions ou attributions comme détachés dans d'autres responsabilités publiques (directions de ministère, d'établissement public...).
Le Conseil d’État fut créé dans sa forme actuelle sous le régime du Consulat et l’impulsion de Napoléon Bonaparte en 1799 pour exercer deux missions historiques :
- conseiller pour la préparation des projets de loi, décret... À l’époque, c’était lui qui défendait les projets devant le « corps législatif »,
- Il fut en plus chargé de préparer les décisions du contentieux administratif.
Le Conseil d’État a vu ses compétences sans cesse accrues et particulièrement comme conseiller de l’État, du Gouvernement, du Parlement pour l’élaboration des textes législatifs.
« LES SAGES » FACE AU POUVOIR
Saisis sous les prétextes les plus variés sur fond de crise sanitaire, aujourd’hui, comme l'écrit un éditorialiste, les «Sages» du Palais-Royal ménagent vaille que vaille la chèvre et le chou : défendre les particuliers mais sans attenter au pouvoir quasi absolu du législateur et de l'exécutif et défendre aussi l’État justement en cas de circonstances exceptionnelles comme la crise sanitaire.
Mais, il garde une marge de manœuvre salutaire et il est intervenu pourtant pour sanctionner des textes du Gouvernement qu’il juge contraires à la constitution et « aux principes fondamentaux du droit français » :
- Ce fut le cas pour le décret sur les offices des cultes qui limitait abusivement la liberté d’exercer un culte. Le Conseil d’État pour sa décision se fonde non sur un texte précis mais sur son devoir «de vérifier qu’il n’y a pas une atteinte disproportionnée aux libertés fondamentales… ». Il a conclu que l'État avait été trop loin et l'a enjoint de modifier son texte (un décret) sous 3 jours.
- Cela va être aussi le cas pour le projet de loi sur le « séparatisme » où là, c’est au titre de conseiller, donneur d’avis…qu’un avis du Conseil d’État sur le texte actuel du Gouvernement sera négatif au moins sur une partie du texte. Ce n’est qu’un avis mais, en général, le législateur ne va pas à l’encontre d’un avis négatif du Conseil d’État.
En réalité, si le Gouvernement et le chef de l’État tentent d’abuser de leurs pouvoirs pour imposer des mesures qui portent atteinte gravement et « inutilement » aux libertés fondamentales, le Conseil d’État peut annuler des textes, soit lors de leur conception si le Conseil d’État est consulté pour avis soit de manière contentieuse quand il est saisi en urgence par des particuliers, des groupements… qui s’estiment victimes d’atteinte aux « libertés fondamentales ».
Le Conseil d’État est donc bien un recours quand les libertés fondamentales sont menacées.