DERNIERE LIGNE DROITE
En ce début de la cinquième et dernière semaine du procès XYNTHIA, iI appartenait au Bâtonnier, Yves-Noël GENTY du barreau des Sables d'Olonne, d'ouvrir la séquence des plaidoiries des parties civiles.
Dans une introduction menée avec la solennité de mise, Maître GENTY a tenu à remercier tous ceux qui ont permis à ce procès hors du commun (12 000 sous-cotes) de se dérouler dans les meilleures conditions possibles.
UN PROJET DE LA MINISTRE DE LA JUSTICE TROUBLANT ET QUI TOMBE MAL
Le bâtonnier se permet donc une incidente : il a appris par un communiqué du Ministère de la Justice que, pour ce type de procès où il y a de nombreuses parties civiles, il est question de créer des juridictions interrégionales spécialisées à Paris et à Marseille.
Cette initiative n'est pas du goût du bâtonnier et cela se comprend dans le contexte du procés exemplaire "ce procés c'est celui d'une justice de proximité, une décision qui sera comprise par les citoyens qui en sont les acteurs et les témoins." dit-il et de se questionner pour savoir comment auraient pu faire les familles des victimes, les 120 parties civiles pour passer 5 semaines à Paris ? Comment aurait pu se faire un transport sur les lieux ? et de conclure que le climat dans lequel le procès s'est déroulé "a permis aux victimes de voir les traumatismes des audiences atténués."
...nous dédions cette réflexion à la Chancellerie...à PARIS.
L'HEROISME DES ANONYMES, UN PROCES POUR COMPRENDRE ET UN ETAT DEFAILLANT
Après cette incidente, Maître GENTY rappelle les actes d'héroîsme des sauveteurs, des habitants qui ont été, au péril de leur vie, au secours de leurs voisins par exemple, des volontaires, des habitants qui ont sauvé un proche "les vrais héros ce sont les anonymes".
"Un procès qui porte une charge émotionnelle intense...lors des témoignages à la barre, lors du transport sur les lieux du drame. il y a cette dimension surhumaine...le froid, le noir, le brusque fracas des ouvertures qui cèdent, la lutte désespérée contre la mort, la certitude que l'on va vivre ses derniers instants....une émotion, une douleur à fleur de peau décuplée ...par l'absence de compassion du maire le jour du drame "..."La compassion qui réalise l'égalité entre celui qui souffre et celui qui partage sa douleur"
"Toutes les victimes partagent ce même but de comprendre"
et de rappeller la phrase du Préfet BROT "c'est l'événement le plus tragique de ma carrière qui me hante et me hantera toute ma vie".
"Un procès pour comprendre, pour servir, pour juger" et surtout ce souhait de Maître GENTY " que cette tragédie soit utile pour l'avenir."
L'avocat rappelle le témoignage de Monsieur JACOBSOONE qui a tiré les leçons de XYNTHIA et aura ainsi "permis de remettre certaines priorités à leur place" : L'Etat a identifié les risques majeurs qui menacent La FAUTE-SUR-MER et L'AIGUILLON-SUR-MER.
Mais avant XYNTHIA que d'erreurs, de manques de l'Etat, la liste égrenée par Maître GENTY est accablante comme un réquisitoire :
- L'Etat a manqué à ses obligations essentielles dans l'instruction du PPRI Plan de Prévention des Risques d'Inondation (voir notre précédent article http://www.olonnes.com/2014/10/proces-xynthia-la-dde-et-son-directeur-adjoint-mis-en-cause.html ) et dans son application,
- L'Etat modifie le zonage et ne s'assure pas que les contreparties réglementaires comme la hauteur des constructions sont respectées,
- un PPRI qui n'en finit pas d'être élaboré, les réunions se succèdent sans finaliser,
- le Préfet délègue aux sous-préfets : l'autorité de l'Etat est défaillante,
- Le contenu du PPRI : l'Etat oublie la mention essentielle de la cote de référence,
- les services sont cloisonnés : on ne se parle pas entre les étages : entre ceux qui traitent le risque et ceux qui traitent l'urbanisme. Maître GENTY cite SARTRE "quand les riches se font la guerre ce sont les pauvres qui meurent."
- l'instruction des permis de construire est catastrophique "la déposition de Monsieur MONTFORT (DDE) le responsable laisse pantois,
- l'Etat s'arque boute sur la défense de sa propriété de quelques arpents de friche du domaine maritime alors que cela retarde les travaux urgents sur les digues,
- devant les blocages de la commune et de son maire, l'Etat ne fait pas de réunion publique pour avertir la population du PPRI et des risques, "on touche à une forme de complaisance ou de frilosité"
- manque de prévision pour l'organisation des secours,
"c'est la médiocrité de l'action régalienne, action inefficace, incomplète, négligence, laxisme"
En résumé "Un Etat qui n'est pas à la hauteur de la tâche."
L'Etat au banc des accusés : oui, mais Maître GENTY ajoutera : "ce comportement n'ôte rien aux responsabilités personnelles des prévenus."
Et il développera les griefs et fautes à imputer au Maire de la FAUTE SUR MER, à son adjointe Madame BABIN, au fils de celle-ci et enfin au sous-directeur de l'Equipement Monsieur JACOBSOONE
A suivre